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La réouverture des écoles le 11 mai 2020  

Le point de vue d'une adhérente

 

Après l’allocution de M. Macron le 13 avril, BFM TV précise que de nombreux scientifiques auraient déconseillé à M. Macron de rouvrir les écoles avant l’été.

 

La décision prise par le président nous laisse bien perplexe : quelle est la logique à rouvrir les écoles (à part économique pour permettre aux parents de retourner travailler) mais pas les restaurants ou les cinémas ? Rassembler plus de 800 enfants et 100 personnels (en ce qui concerne le Lycée Franco-Allemand de Buc) serait souhaitable, mais servir 50 ou 100 couverts dans un restaurant n’est pas envisageable... Et comment expliquer qu’on fasse faire la queue aux clients devant les supermarchés pour qu’ils ne soient pas trop nombreux en même temps dans les rayons, mais qu'on puisse garder des élèves enfermés dans des salles de classes ?

 

Monsieur Macron n'a pas caché qu'il avait pris cette décision en grande partie pour permettre aux parents de reprendre leur travail. C'est donc bien l'économie qui prime sur l'humain et sur la santé, contrairement aux grandes déclarations tonitruantes de nos dirigeants et de M. Macron lui-même. A quand la fin de la schizophrénie ?

 

Les salariés qui, pour des raisons compréhensibles, appellent de leurs vœux la réouverture des écoles seront les premiers à reprocher à M. Macron d'avoir rouvert les écoles trop tôt, s’ils se retrouvent avec des enfants malades sur les bras.

 

En quoi cela aidera-t-il les entreprises et les salariés, si les enfants ramènent le virus à la maison et contaminent les membres de leurs familles ? Ces derniers pourront-ils vraiment se consacrer à leur travail dans de telles conditions, si une deuxième vague d’épidémie arrive ?

 

Dans les médias allemands, les journalistes s’interrogent : la fermeture des écoles ayant été la première décision prise en urgence, car le risque de contagion était trop important, pourquoi certains pays veulent-ils entamer le déconfinement en les rouvrant en premier ? (7:20 à 9.25 C'est le lien vers les nouvelles allemandes du 13 avril)

 

Le cas de l’Autriche, l’un des premiers pays à se lancer dans le déconfinement, mérite également d’être évoqué. L’Autriche commence le déconfinement en rouvrant d’abord les commerces, puis les restaurants et les hôtels. Ensuite seulement les écoles rouvriront.

La réouverture des écoles constitue l’avant-dernière étape du déconfinement, la dernière étape étant la levée de l’interdiction des rassemblements (festivals, spectacles, congrès etc.).

 
Dans son allocution du 6 avril 2020, le chancelier de l‘Autriche souligne les risques liés à la réouverture des écoles, en particulier les difficultés à faire respecter les règles de sécurité, comme les gestes barrière, le port du masque et la distanciation sociale.

 

En effet, il paraît parfaitement illusoire de croire que les élèves vont respecter les distances de sécurité, avec les professeurs, ou entre eux - et encore moins dans la cour de récréation. Et qui peut imaginer des enfants en crèche, en maternelle et à l’école élémentaire porter bien sagement des masques et rester loin de leurs camarades ? Même les élèves de terminale ont l’habitude d’être agglutinés les uns aux autres. Le réalisme s’impose.

 

D’ailleurs, on voit mal comment les élèves vont manger à la cantine avec un masque. Et s’il faut qu’ils soient assis à 1m50 de distance les uns des autres, alors combien de services va-t-il falloir prévoir à la cantine ?

 

Si jamais les cours reprennent le 11 mai, nous devrons signaler dans le RSST tous les manquements aux règles sanitaires. Il faudra aussi signaler systématiquement les problèmes d’hygiène. Les salles seront-elles vraiment désinfectées tous les jours ? En temps normal, il est déjà difficile de maintenir les salles et les toilettes propres. Où allons-nous trouver le personnel d’entretien chargé de désinfecter quotidiennement les salles, la cantine, les toilettes ?

 

Un dernier point. Un jour après l’annonce de président, nous apprenons que la reprise de l’école ne sera pas obligatoire, qu’elle se fera en petits groupes. Mais quelle pourra bien être l’efficacité de ces mesures ?

 

Si aller à l’école n’est pas obligatoire, seuls les parents obligés de se rendre sur leur lieu de travail prendront le risque d’envoyer leurs enfants à l’école. Les autres resteront à la maison. Quid alors des professeurs ? Faut-il rappeler que nous n’avons pas le don d’ubiquité ? Nous ne pouvons pas assurer des cours en petits groupes à l’école et, en même temps, continuer de proposer du télétravail aux élèves qui restent chez eux. Il va falloir trancher…

 
La conférence de presse avec le chancelier fédéral d'Autriche


Alexandra Strelow

Professeur agrégé d’allemand

Lycée Franco-allemand de Buc