SNALC

Plan tablettes et manuels numériques au Lycée

Le SNALC-Versailles a été reçu vendredi 10 avril 2019 par le cabinet de Valérie Pécresse au sujet des manuels numériques et des tablettes.

Le cabinet de Mme Valérie Pécresse, représenté par M. Rolland JOUVE, Conseiller éducation et Mme Nadia HAMOUR, Directrice Politiques Educatives et Transformation Numérique, a voulu recevoir le SNALC afin d’échanger autour du numérique (manuels et tablettes). En effet la région a prévu de donner à chaque lycéen, entrant en seconde, une tablette numérique sur laquelle seront téléchargés les manuels numériques choisis par les établissements.

Dès la rentrée 2019, les lycées professionnels seront tous obligatoirement dotés, quant aux lycées généraux et technologiques, ils seront fortement encouragés à opter pour le numérique, étant entendu qu’à terme l’ambition de la région est d’imposer le 100 % numérique à tous les lycées franciliens.

La position du SNALC est d’être contre ce plan tablettes. Les arguments qui ont été donnés reposent sur plusieurs points :

  • Environnemental : matériaux rares, obsolescence, gestion des déchets…
  • Logistique : qui va les charger, les télécharger, les réparer ? Quid du stockage, du vol ?
  • Sanitaire : problèmes d’addiction vis-à-vis des écrans, troubles de la vue, de la concentration, problème des ondes avec le WIFI (transformation des établissements scolaires en micro-ondes) …
  • Pédagogique : couper les élèves du papier c’est les couper du livre, la liberté pédagogique…

Tout d’abord nous avons appris que la région avait déjà pris sa décision et que le projet était acté.

Ensuite il est question que la région fournisse tous les lycées mais pas les enseignants car leur autorité de tutelle est le Ministère de l’éducation nationale.

Devant notre étonnement quant à l’autonomie des établissements (refrain habituel des politiques du moment), il nous a été répondu que rien n’était imposé mais que les établissements choisiraient (à l’exception des lycées professionnels qu’on cherche ainsi à valoriser).

Le SNALC a demandé qui du conseil d’administration ou du chef d’établissement choisissait. Il nous a été répondu que normalement ceci était une décision collective mais que le chef d’établissement était l’interlocuteur privilégié, la région n’ayant ni les moyens ni l’envie de vérifier qui avait pris la décision.

Ainsi décentralisation, déconcentration et autonomie des établissements permettent à nos différents interlocuteurs, chaque fois que nous soulevons un problème, d’entonner un couplet malsain « Ce n’est pas moi, c’est l’autre ». Et ceci est encore plus prégnant pour les lycées professionnels. En effet, malgré les compétences séparées de ces interlocuteurs, il est aisé de noter que toutes leurs décisions convergent vers le même but.

Le 100 % numérique imposé en LP, dès la prochaine rentrée, n’est probablement pas étranger à la mixité des publics et à la formation tout au long de la vie. Ces deux concepts, très tendances, conduisent à mettre à la charge des PLP, en même temps et sans rémunération supplémentaire, la formation d’un public très hétérogène de 15 à 65 ans. Le numérique permettra de « former à distance » les apprentis majeurs, les salariés en formation, les chômeurs en reconversion et les NEET[1] qui suivront depuis leur domicile les cours en présentiel donnés aux lycéens. Quant au suivi pédagogique et à la certification, les PLP auront tout le loisir de corriger et de valider les compétences de ce public fantôme le soir à leur domicile (que de cases à cocher en perspective…).

Nous avons appris entre autres que pour les établissements qui choisissaient de passer aux tablettes, il n’y aurait plus de rachat d’équipement fixe d’ordinateurs mais qu’ils continueraient à être dotés en manuels papiers, s’ils le désiraient.

Les élèves de seconde se verront prêter une tablette pour la durée de leur scolarité. Au bout de trois ans, elle sera à eux si tout va bien. Il y aura un contrat de garantie par tablette en cas de panne ou de casse, charge aux élèves et aux familles de rentrer en contact avec le SAV du fabricant. Ce sera à l’élève de veiller à ce que la tablette soit chargée.

Les élèves auront accès à internet et aux manuels numériques installés par l’entreprise avec laquelle la région aura passé le contrat (pas d’information à ce sujet pour l’instant). Si l’enseignant le désire, il pourra installer lui-même un logiciel interactif d’exercices ou autre.

Le SNALC demeure très sceptique quant à l’utilité d’un tel projet et à sa mise en place. Ne pas fournir les enseignants est un non-sens. Croire à l’autonomie des élèves est utopique quand on voit au quotidien, sur le terrain, la réalité des choses.

De plus, pour l’enseignement professionnel, les tablettes ne seront pas en mesure de supporter des logiciels professionnels (avec l’annonce du non renouvellement des postes fixes, cela fait craindre le pire pour l’avenir). Pour ce qui est des disciplines d’enseignement général en lycée pro, les collègues utilisent peu les manuels, et les professeurs de maths-science savent déjà que les versions tablettes des applications telles que GeoGebra ou tableur sont difficilement utilisables et bien moins performantes que les versions PC. Que reste-il, alors, d’un point de vue pédagogique ? Des applications QCM, Kahoot et compagnie, tant prisées par les inspecteurs car soi-disant ludiques. Si ces tests de connaissances peuvent avoir une utilité, ils sont limités voire contre productifs pour développer les capacités à rédiger qui font cruellement défaut à beaucoup de lycéens professionnels.

Par ailleurs ces expérimentations ont déjà eu lieu dans certains collèges de l’Essonne fournis par le département et le bilan n’est pas positif, à cause entre autres des problèmes logistiques d’installation et de maintenance qu’un plan tablette entraîne.

La région a cité le lieu commun de la modernité, du progrès et de la nécessité que les enseignants, souvent réfractaires, s’adaptent.

Le SNALC a conclu en disant que le problème n’était pas la capacité d’adaptation des enseignants, car cela fait longtemps qu’ils n’avaient d’autre choix, mais bien l’aspect logistique d’un tel projet.

Quand on voit les problèmes matériels des lycées concernant ne serait-ce que leurs locaux, et que la région peine à tout gérer, comment va-t-elle gérer les tablettes de tous les lycéens franciliens ?

Elle ne va rien gérer, c’est sur les élèves, leurs familles et les enseignants que reposera la logistique. C’est beau le progrès.

Collègues et parents d'élèves vous pouvez rejeter la proposition de la région lors du prochain CA.

 

 Angélique ADAMIK, Valérie LEJEUNE-LAMBERT et Frédéric SEITZ pour le SNALC-VERSAILLES

 

[1] NEET Not in Education, Employment or Training (ni étudiant, ni employé, ni stagiaire).

« 22 % des jeunes de 20 à 24 ans sont ni en emploi, ni en enseignement, ni en formation. » Mail JM Blanquer – École de la confiance - 29/03/2019